vendredi 21 janvier 2011

RIP Mohamed

 Une chose que je n'oublierai jamais et que j'espère que l'on oubliera jamais, la façon dont les évènements historiques qui se déroulent en ce moment-même en Tunisie ont commencés.

 Mohamed Bouazizi, un jeune vendeur ambulant de 26 ans s'est immolé par le feu le 17 décembre dernier, provoquant les évènements que l'on sait.
 Qui était Mohamed? Un jeune comme les autres, qui avait été obligé d'arrêter ses études universitaires après la mort de son père, et de se transformer en marchand de fruits et légumes pour nourrir une famille de 7 personnes.
 Que pouvait être ses espérances? Probablement comme tout le monde, à rêver de l'Europe et de la France, à se sentir mal à l'aise dans un régime autoritaire, espérant plus de libertés et de grandeur tout en sachant pertinemment au fond de lui-même que sa culture et son identité étaient consubstantiels aux barbus qui commencent déjà à revenir et à revendiquer.
 Qu'a-t-il pensé au moment de se transformer en torche humaine? Probablement un profond désespoir devant ce régime violent et corrompu, qui pourtant avaient permis de mettre le pays sur la voie des pays développés, aussi bien économiquement que culturellement.

 C'est peut-être cela la leçon à retenir, pour que les capitaux soient investis et que les jeunes filles puissent sortir en jupe les cheveux dans le vent, il a fallu un état dont les fonctionnaires avaient si peu de cœur pour priver un jeune homme comme les autres de sa seule fierté.
 Qu'est-ce que l'histoire sinon une suite sans fin de faits divers, et de gens qui ne savent pas vraiment ce qu'ils font? L'important n'est pas simplement le geste, mais comment il est ressenti.
 Involontairement, Mohamed a probablement été à l'origine d'un tournant historique, d'un effet domino sans précédent qui va nous faire basculer dans le XXI° siècle, mais je me demande bien si il en avait conscience. C'est d'ailleurs la faille dont profitent les sociologues et les gauchistes: il est très rare que individuellement on désire vraiment quelque chose. Mohamed s'est transformé en torche humaine, les gaugauches le voient comme une revendication sociale, les barbus et les moudjahidines comme le début d'un renouveau, et les autres qui suivent sans vraiment savoir.

 Les derniers mots de Mohamed à sa mère avant de mourir le 4 janvier dernier ont été les suivants: "Ne m'en veux pas maman, ce n'est pas de ma faute. Ce n'est pas moi qui veut ça, c'est la faute de l'époque".
 Des mots lourds de sens pour quiconque sait les entendre.

 Repose en paix Mohamed.